Il y a des films qui parviennent à nous faire ressentir des émotions à travers l’histoire, la musique, la réalisation ou même la prestation des acteurs. Mais le climat dans lequel vous regardez un film peut aussi influencer l’impact qu’il aura sur vous. Alors que les grandes surfaces accrochent déjà les décorations de Noël, vu que l’hiver approche tout doucement, l’heure est donc venue pour vous de choper une couverture, de faire un petit chocolat chaud et de vous affaler sur un canapé car voici une liste de cinq films à regarder pour bien passer l’hiver. Ces œuvres, dont l’action se déroule principalement dans un climat glacial, jouent sur la psychologie des personnages. Le cadre hivernal ou même l’ambiance hivernale (à travers la photographie, par exemple) paraît, dans certains cas ci-dessous, comme oppressant et offensif ; il se présente comme un gros obstacle hostile aux personnages, ce qui influence la réception du spectateur.
EDGE OF WINTER / ESCAPADE FATALE (2016) de Daniel Espinosa
Alors que leur mère part en vacances avec leur beau-père, Bradley (Tom Holland) et Caleb (Percy Hynes White) sont confiés à leur père, Elliot (Joel Kinnaman), un homme qu’ils n’avaient jamais vu auparavant. Ce dernier les emmène tirer à la carabine dans une forêt qui, malheureusement, se voit envahie par la neige. C’est donc dans une cabane abandonnée que les trois hommes passeront les quelques jours de tempête ensemble. Sauf que Elliot se montre un peu trop possessif avec ses enfants, et ce qui devait être une belle expérience père-fils se tourne rapidement en cauchemar.
Comment réagiriez-vous si vous étiez amenés à passer un week-end avec un père que vous n’avez jamais connu ? Les frères Baker, eux, avaient d’abord de l’appréhension. Elliot est tout sauf paternel ; à vrai dire, il n’a pas encore grandi. Il ne sait pas exactement quel ton aborder avec ses garçons, et il choisira alors la voie la plus facile, celle de l’autorité absolue : « Obéissez, c’est tout ! ». Tout au long du film, les adolescents éprouveront de la peur face à leur géniteur, même lorsque des liens semblent se tisser. Il faut dire que Joel Kinnaman (House of Card, The Killing, Suicide Squad) interprète ici une personne très énigmatique. Ses émotions ne sont pas toujours très claires. Aime-t-il ses fils ? Veut-il se racheter ? Se sent-il forcé de passer du temps avec eux ?
Lorsqu’il apprend que son ex-femme prévoit d’aller vivre à Londres avec les enfants, il pète littéralement les plombs ; ce qui marque le gros tournant du film. Une tempête de neige les force à se réfugier dans une vieille cabane, juste après que Bradley et Caleb aient pu voir le vrai visage d’Elliot, celui d’un homme mentalement instable. L’environnement agit dans ce cas comme une prison. Les personnages se sentent piégés, d’un côté, et protégés de l’autre. Les frères n’ont nulle part où aller ; la voiture est à des kilomètres, tout comme la grande route. Tandis que leur paternel se sent bien, loin de la civilisation, seul, avec sa progéniture.
ARRIVAL / PREMIER CONTACT (2016) de Denis Villeneuve
Quand douze vaisseaux spatiaux atterrissent dans douze endroits différents sur Terre, les gouvernements du monde décident d’utiliser des moyens pacifiques pour entrer en contact avec ces visiteurs inattendus. Ils font appel à des linguistes, parmi lesquels se trouve Louise Banks, la première personne à vraiment communiquer avec ces aliens.
Dans ce long-métrage de Denis Villeneuve, le spectateur découvre une nouvelle façon d’exploiter une invasion extra-terrestre au cinéma. On n’y retrouve pas d’affreux combats entre humains et aliens, ni même des destruction catastrophiques de buildings. Le cinéaste canadien a préféré une approche plus intime et plus réfléchie. À travers son histoire, il montre à quel point les nations n’ont pas de raison de ne pas communiquer davantage entre elles. L’arrivée de ces visiteurs de l’espace apparaît comme un challenge pour la Terre entière, elle met au défi la race humaine de véritablement coexister.
La vraie puissance du film se cache dans l’ambiance sonore ; ce qui lui a d’ailleurs valu l’Oscar du meilleur montage sonore. Tout cela, le public le doit à Johann Johannsson, le compositeur, et Sylvain Belleflamme, le monteur sonore. La musique de Johannsson se présente tantôt calme, tantôt agressive, dictant ainsi les ressentis du spectateur. Les effets sonores, eux, viennent renforcer la part de mystère qu’a l’atmosphère d’Arrival, mais accentuent également ce côté froid du film, marqué par une photographie assez grise.
THE GREY / LE TERRITOIRE DES LOUPS (2012) de Joe Carnahan
Des survivants d’un crash d’avion en Alaska sont coincés dans une forêt enneigée. Menacés par le froid et les loups, il n’y qu’un seul homme pour les ramener sains et saufs : John Ottway (Liam Neeson), chargé de la protection de ces travailleurs d’une compagnie pétrolière. Mais cette fois-ci les prédateurs deviennent les proies dans un terrain qu’ils ne connaissent pas : le territoire des loups.
Dans ce film, il n’est question que de lutte. Il y a d’abord la lutte intérieure reflétée par l’instinct de survie de ces hommes. Dès le début, ils prennent les choses en main et décident de se déplacer afin de ne pas geler. Ensuite, une lutte au sein du groupe de survivants s’installe. Qui va les diriger ? John Ottway, étant le seul armé et entraîné, se montre naturellement en leader, sauf que John Diaz (Frank Grillo), le nerveux de la bande, prétend lui aussi au poste de meneur. Enfin, ces sept rescapés doivent lutter contre Dame Nature, et elle ne se montre pas clémente avec eux. Agressés par la tempête de neige incessante, il faut qu’ils échappent aux gueules baveuses de loups féroces et affamés.
D’ailleurs, ces canidés ne sont visibles que très rarement. Un choix bien payant de la part du réalisateur qui a préféré miser sur l’ambiance sonore. Le silence de la forêt se marie parfaitement avec les hurlements des loups, mettant en place un suspense insoutenable. Le spectateur sait que les protagonistes seront attaqués, mais il ignore à quel moment.
WIND RIVER (2017) de Taylor Sheridan
Cory Lambert (Jeremy Renner), un garde forestier travaillant pour United States Fish and Wildlife Service, trouve, dans une réserve indienne du Wyoming, le cadavre d’une jeune fille presque enfui sous la neige. Afin de résoudre cette affaire, le FBI envoie leur agent le plus proche, Jane Banner (Elizabeth Olsen), une nouvelle dans le métier. Cette dernière va donc faire appel à Cory, lui qui connaît si bien les environs, pour l’aider dans cette mission.
L’environnement dans lequel vous vivez peut-il influencer votre comportement ? Voici justement de quoi traite le film. Pensez-vous pouvoir tenir le coup si vous habitiez dans une petite ville entourée par les montagnes, où le silence règne à longueur de journée ? Pas d’animations, pas de compagnie chaleureuse, pas de vie, juste de la neige à perte de vue. L’atmosphère de ce film paraît très lourde. Le début est d’ailleurs assez lent, mais il exprime particulièrement bien le quotidien des habitants de cette réserve indienne. La musique, qui revient très souvent, se nomme Three Seasons in Wyoming de Nick Cave et Warren Ellis et accentue, encore une fois, la routine sinistre et plate de cette petite ville.
Sauf que, vous le savez tous, après le calme vient la tempête, mais un peu avant cela, le film installe confortablement le spectateur dans une tension redoutable en jouant avec une impasse mexicaine terrifiante et inoubliable. La violence des rares scènes d’action atteint un niveau incroyablement spectaculaire et terriblement réaliste. Les coups se sentent à travers l’écran.
THE HATEFUL EIGHT / LES HUIT SALOPARDS (2015) de Quentin Tarantino
Le brave cocher O.B. Jackson (James Parks) conduit dans sa diligence le chasseur de primes, John Ruth (Kurt Russell), et sa prisonnière, Daisy Domergue (Jennifer Jason Leigh), jusqu’à Red Rock. Sur la route, ils vont croiser et repêcher le major Marquis Warren (Samuel L. Jackson), ainsi que le nouveau shérif de Red Rock, Chris Mannix (Walton Goggins). Alarmés par l’approche d’une grosse tempête, les cinq voyageurs se réfugient dans un chalet dans lequel se trouve déjà quatre autres personnes : Oswaldo Mobray (Tim Roth), le bourreau de Red Rock, Joe Gage (Michael Madsen), le conducteur de troupeaux, Sandford Smithers (Bruce Dern), un général confédéré, et Bob (Demian Bichir), chargé du relais en l’absence du propriétaire du chalet. La cohabitation est menacée lorsque John Ruth soupçonne l’un d’entre eux d’être le complice de Daisy.
Neuf personnages atypiques forcés de passer quelques jours ensemble dans un chalet, ça ne peut que tourner au vinaigre. D’autant plus quand, dans le lot, se trouvent des fortes têtes comme John Ruth, Marquis Warren et Chris Mannix. Les dialogues suffisent amplement pour plonger le spectateur dans l’aventure, ajoutez à cela les prestations énergiques de chacun des acteurs pour s’immerger dans cette expérience à huis clos. La folie et la paranoïa règnent en maîtresses dans ce film ; les personnages ne se font aucunement confiance et ne cessent de se provoquer. La plupart ont déjà tué auparavant, et voilà sur quoi joue Tarantino : qui va ouvrir le bal en tirant le premier coup ?
Le huis clos semble très forcé, mais fonctionne étonnamment bien. Le fait que les personnages soient obligés de bloquer la porte avec des clous et des planches amplifie l’idée qu’ils savent, inconsciemment, que ce chalet est la ligne d’arrivée, le point culminant dans leur vie ; ils ne peuvent pas s’en échapper. Leurs interactions se gâtent de plus en plus, les esprits s’échauffent rapidement ; le film entier rappelle également la scène du bar dans Inglorious Basterds ou encore le dîner à Candy Land dans Django Unchained, dans lesquelles on pouvait y trouver un climat de guerre froide.